Quand une articulation devient rouge, chaude, enflée et douloureuse, les injections de corticostéroïdes sont souvent la solution rapide que les médecins proposent. Ce n’est pas une cure, mais un arrêt d’urgence pour calmer une inflammation qui bloque la vie quotidienne. Des milliers de personnes reçoivent chaque année cette injection dans le genou, l’épaule, le poignet ou même le pied. Pourquoi ? Parce que, dans les premiers jours, elle fonctionne. Très bien.
Comment ça marche vraiment ?
Les corticostéroïdes, souvent appelés cortisone, ne sont pas des analgésiques comme l’ibuprofène. Ils agissent directement sur l’inflammation. Quand un médecin injecte un corticostéroïde dans une articulation, la substance pénètre dans le tissu synovial - cette membrane qui entoure l’articulation et produit le liquide qui la lubrifie. Là, elle bloque les signaux chimiques qui font gonfler et douloucir la zone.
Elle empêche la production de cytokines pro-inflammatoires comme l’interleukine-1 et le facteur de nécrose tumorale-alpha. Elle réduit aussi la synthèse des prostaglandines, ces molécules qui amplifient la douleur. En quelques heures, le gonflement diminue. En 24 à 72 heures, la plupart des patients ressentent une nette amélioration. C’est ce qui fait la force de cette approche : la rapidité.
Les préparations courantes incluent le triamcinolone acétone, le méthylprednisolone acétate ou la béthaméthasone. Elles sont toujours mélangées à un anesthésique local comme la lidocaïne pour atténuer la douleur de l’injection elle-même. La dose varie selon la taille de l’articulation : 40 à 80 mg pour un genou, 10 à 20 mg pour un doigt ou un poignet.
À qui ça aide vraiment ?
Les injections de corticostéroïdes ne sont pas une solution universelle. Elles sont efficaces pour les inflammations aiguës, pas pour les dégénérescences chroniques. Par exemple :
- Arthrite inflammatoire : rhumatisme articulaire, spondylarthrite ankylosante - elles apaisent les poussées.
- Bursite : inflammation du sac de liquide autour de l’épaule ou du genou - souvent très efficace.
- Tendinite : tennis elbow, tendinite d’Achille - elles calment la douleur pour permettre la rééducation.
- Goutte aiguë : elles agissent plus vite que les médicaments par voie orale.
En revanche, pour l’arthrose avancée, où le cartilage est usé, les injections ne réparent rien. Elles peuvent même accélérer la dégradation du tissu si elles sont répétées trop souvent. L’American College of Rheumatology recommande de ne pas les utiliser chez les patients dont les radiographies montrent une arthrose sévère.
Combien de temps ça dure ?
La durée de l’effet varie d’une personne à l’autre. En moyenne, la soulagement dure entre 2 et 4 semaines. Pour certains, c’est 8 semaines. Pour d’autres, à peine 3 jours. Une étude de 2023 sur 15 essais cliniques a montré qu’au-delà de 6 semaines, il n’y a plus de différence significative avec un placebo. Et à 24 semaines ? Aucun bénéfice mesurable.
Les patients qui répondent bien aux deux premières injections ont souvent une réponse plus faible à la troisième. Certains rapportent même un « coup de poing » après l’injection : une douleur intense pendant 2 à 3 jours, causée par la cristallisation du médicament. C’est rare, mais ça arrive. On le gère avec du glace et des anti-inflammatoires.
Combien ça coûte ?
Le prix d’une injection varie entre 100 et 300 dollars aux États-Unis sans assurance. C’est bien moins cher que les alternatives comme la viscosupplémentation (500 à 1 000 $) ou la thérapie PRP (500 à 1 500 $). Pourtant, la PRP et les cellules souches promettent des effets plus durables - même si les preuves scientifiques sont encore limitées.
Le vrai avantage des corticostéroïdes, c’est leur rapport coût-efficacité à court terme. Si vous avez besoin de reprendre le travail, de jouer au golf ou de marcher sans douleur dans les prochaines semaines, c’est l’option la plus rapide et la moins chère.
Quels sont les risques ?
Les injections de corticostéroïdes sont sûres… quand elles sont bien utilisées. Mais elles ont des effets secondaires réels :
- Augmentation du taux de sucre : chez les diabétiques, la glycémie peut monter pendant 72 heures. Une surveillance est nécessaire.
- Dépigmentation de la peau : autour du point d’injection, la peau peut devenir plus claire, surtout chez les personnes à la peau foncée.
- Rupture tendineuse : le risque est faible, mais il augmente avec les injections répétées. Les tendons d’Achille et les rotules sont les plus vulnérables.
- Altération du cartilage : plusieurs études montrent que les patients qui reçoivent plusieurs injections dans le genou ont un risque 3 à 4 fois plus élevé de progression de l’arthrose sur les radiographies.
- Infection post-chirurgicale : une étude de 2023 a révélé que les patients ayant reçu une injection dans les 3 mois avant une prothèse de hanche ou de genou avaient 2,13 fois plus de risques d’infection après l’opération.
L’American College of Rheumatology recommande de limiter les injections à 3 ou 4 par articulation par an. Au-delà, le risque l’emporte sur le bénéfice.
Comment savoir si c’est la bonne décision ?
Une injection n’est pas juste un traitement. C’est aussi un diagnostic. Si la douleur disparaît après l’injection, c’est une preuve que l’articulation ciblée est la source du problème. C’est utile quand la douleur est floue - par exemple, quand on ne sait pas si c’est l’articulation, le tendon ou le nerf qui cause la gêne.
Le meilleur moment pour l’injecter ? Quand la douleur est aiguë, mais que l’articulation n’est pas encore trop endommagée. Pas quand la douleur est chronique depuis des années. Pas quand les radiographies montrent un cartilage presque disparu.
Les médecins expérimentés utilisent l’échographie pour guider l’aiguille. Sans échographie, la précision tombe à 70 %. Avec, elle monte à 95 %. Cela réduit les risques d’injection dans le mauvais endroit, et augmente l’efficacité.
Et après l’injection ?
Ne reprennez pas le sport ou les efforts intenses pendant 48 heures. L’articulation est plus vulnérable. Même si vous ne ressentez plus de douleur, le tissu est encore en train de se calmer. Une activité trop rapide peut déplacer les cristaux du médicament ou aggraver l’inflammation.
Les diabétiques doivent vérifier leur glycémie pendant 3 jours. Une augmentation de 20 à 30 % est courante, mais elle revient à la normale en quelques jours.
Si vous avez une poussée après l’injection - douleur intense, gonflement, chaleur - ne paniquez pas. C’est souvent temporaire. Appliquez de la glace, prenez un anti-inflammatoire non stéroïdien, et contactez votre médecin si ça dure plus de 72 heures.
Les alternatives : PRP, cellules souches, ou rien ?
Les thérapies comme la PRP (plasma riche en plaquettes) ou les cellules souches sont de plus en plus populaires. Elles coûtent plus cher, mais elles visent à réparer, pas seulement à calmer. Pourtant, à court terme, les corticostéroïdes restent supérieurs en efficacité. À 3 mois, la différence disparaît. À 6 mois, les résultats sont similaires.
Les essais en cours étudient des combinaisons : corticostéroïdes + PRP. L’idée ? Profiter de la rapidité du cortisone et de la régénération potentielle de la PRP. Rien n’est encore prouvé, mais c’est une piste sérieuse.
En attendant, les corticostéroïdes restent le pilier du traitement des inflammations aiguës. Pas parce qu’ils sont parfaits, mais parce qu’ils sont rapides, abordables et efficaces - quand on les utilise comme il faut.
Quand éviter les injections ?
- Si vous avez une infection dans ou près de l’articulation.
- Si vous avez eu une infection après une injection précédente.
- Si vous êtes enceinte (sauf cas exceptionnels sous surveillance).
- Si vous avez déjà eu une rupture tendineuse après une injection.
- Si votre articulation est déjà très détruite sur les radiographies.
- Si vous avez besoin d’une chirurgie dans les 3 prochains mois.
Les injections de cortisone font-elles grossir ?
Non, les injections locales de corticostéroïdes ne provoquent pas de prise de poids. Ce sont les traitements oraux ou intraveineux à long terme qui peuvent entraîner des effets métaboliques comme la rétention d’eau ou l’augmentation de l’appétit. Une injection dans le genou ou l’épaule n’atteint pas les niveaux systémiques suffisants pour causer cela.
Combien de fois puis-je me faire injecter dans le même genou ?
La plupart des spécialistes recommandent de ne pas dépasser 3 à 4 injections par an dans la même articulation. Au-delà, le risque de dommages au cartilage, aux tendons ou aux os augmente. Si vous avez besoin de plus de 3 injections par an, il faut revoir la stratégie globale de traitement - avec une rééducation, un changement d’activité ou d’autres options.
L’injection fait-elle mal ?
L’injection elle-même cause une brève douleur, comme une piqûre. Mais elle est mélangée à un anesthésique local, donc la douleur dure seulement quelques secondes. Après, vous pouvez ressentir une pression ou une gêne légère. Certains patients décrivent une poussée de douleur 24 à 48 heures après, mais c’est temporaire et lié à la réaction du tissu au médicament.
Est-ce que les injections de cortisone guérissent l’arthrose ?
Non. Les injections de corticostéroïdes ne réparent pas le cartilage usé. Elles réduisent seulement l’inflammation qui accompagne l’arthrose. Cela soulage la douleur, mais ne ralentit pas la dégradation du tissu. Pour l’arthrose avancée, elles ne sont pas recommandées en tant que traitement principal.
Puis-je conduire après une injection ?
Oui, sauf si l’injection est dans une jambe ou un pied et que vous ressentez une faiblesse ou une perte de sensation. Dans ce cas, attendez 24 heures. Pour une injection dans l’épaule ou le coude, vous pouvez conduire normalement. Mais évitez les mouvements brusques pendant 48 heures pour ne pas aggraver l’inflammation.
Conclusion : un outil, pas une solution
Les injections de corticostéroïdes sont un outil puissant - mais comme une clé anglaise : utile pour serrer un boulon, dangereuse si on en fait un marteau. Elles ne guérissent pas, elles calment. Elles ne réparent pas, elles dégagent la voie pour que la rééducation puisse commencer. Leur valeur réside dans leur rapidité, leur accessibilité et leur efficacité à court terme.
Leur danger ? L’abus. L’attente qu’elles soient la réponse à tout. Quand elles sont utilisées avec discernement, dans les bonnes indications, et avec une planification de suivi - elles sauvent des vies actives. Quand elles sont répétées sans réflexion, elles peuvent causer plus de mal que de bien.
Le vrai succès, ce n’est pas de se faire injecter. C’est de savoir quand arrêter, et comment aller plus loin.
1 Commentaires
J'ai reçu une injection au genou il y a deux semaines. J'ai pu reprendre la marche sans douleur en 48h. C'est magique, mais j'ai peur de m'en faire une autre trop vite.
Je sens que mon corps me dit 'merci, mais pas encore'.